Jouer un rôle dans cette guerre? Très peu pour moi... [PV Tullia]

Il faisait pluvieux ce jour-là.
La pluie était tombée une bonne partie de la matinée et une éclaircie avait pointé le bout de son nez en début d’après-midi. Il n’empêche qu’il faisait toujours aussi gris et l’eau du ciel menaçait toujours de tomber en trombe. Le sol était trempé, parsemé de flaque d’eau de différentes tailles. Certaines, les plus imposantes, s’étaient même transformées en bourbier dont il était difficile de s’extraire. Il fallait donc faire attention où on mettait les pieds. Une fois les plaines et les forêts dépassées, le sol devait plus dur et parcourut de rocher de toute forme et de toute taille, annonçant le territoire des petites montagnes rocheuses. Là encore, il fallait prendre garde car avec la pluie, la roche était glissante et peut sûre sous les pieds. Et le risque était gros puisqu’on pouvait à tout moment dévaler les falaises.
C’est dans ses conditions que Sora avait décidé de s’aventurer sur ces terres. Son cheval peinait à avancer entre les amas de roche et sur la pierre mouillé qui constituait les bords des falaises. Au bout d’un moment, elle dut mettre pied à terre afin d’alléger sa monture et de la guider prudemment. La démone ne s’inquiétait pas trop pour elle-même. Si elle dérapait, elle pouvait toujours se rattraper grâce à ses ailes, mais son cheval n’était pas fait pour ce type de terrain et s’il glissait, finirait probablement sa course au fond du précipice ce qui serait désastreux. La démone ne tenait pas à faire tous les trajets avenir à pied ou en vol. Et puis, elle n’avait pas si cher payé cette bête pour la voir terminer écraser contre des rochers. Et le pire dans tout ça, c’était qu’il commençait à y avoir un fin crachin et que la luminosité baissait lentement, annonçant la nuit. Il fallait donc qu’elle se trouve un abri avant qu’il ne fasse trop noir.
Et chose qui n’était pas très rassurante, il lui semblait avoir vu une wyrm rôder dans les parages, mais c’était difficile à dire. Sora ne l’avait vu qu’un bref instant et d’assez loin, il pouvait bien s’agir d’un énorme oiseau. Donc, mieux valait ne pas trop trainer dans les environs. Elle pressa le pas, toute son attention portée sur l’endroit où elle mettait les pieds.
Heureusement, quelques centaines de mètres plus loin, le chemin s’élargissait et menait trou droit à un petit village reculé dans les montagnes. Vu le nombre de maison, il devait y avoir une cinquantaine d’habitants peut-être moins. Plusieurs paysans s’afféraient encore à l’extérieur, se dépêchant de finir leur besogne avant la nuit ou avant que la pluie ne revienne. Ils ne firent pas trop attention à la jeune femme qui venait d’entrer dans leur village, apparemment habitués de voir des voyageurs passés par ici. Il faut dire, c’était l’un des rares chemins praticables avec un cheval que la démone ait pu trouver. D’autres faisaient probablement comme elle. Sora continua d’avancer jusqu’à tomber sur l’auberge du village. Ce n’était pas très grand, tout juste une dizaine de chambre. Il faut dire, ce n’était pas le peine de construire une énorme auberge vu le nombre de voyageur qui y arrivait. Ils passaient une nuit et s’en allait dès le matin. C’était peu probablement de voir débarquer plus d’une dizaine d’aventurier en même temps.
La jeune femme alla placer son cheval dans l’écurie attenante à la taverne et le laissait au bon soin du palefrenier. Elle récupéra ses affaires (le peu qu’elle avait) et sortit du petit bâtiment pour se diriger vers l’entrée de l’auberge. Elle prit sa bourse et compta rapidement l’argent qui lui restait afin de voir s’il lui restait suffisamment pour se payer un repas et une chambre pour une nuit. Le compte était juste si le prix restait le même que dans les autres auberges qu’elle avait déjà visitées. La jeune femme pénétra ensuite à l’intérieur où il régnait une chaleur agréable. Il y avait peu de client ce qui était parfait, juste à son goût. Elle s’assit à une table avant de prendre commande auprès du patron lui-même. Celui-ci repartit ensuite en cuisine et lui ramena sa commande quelques instants plus tard. Un bon morceau de viande accompagné de bouillie et une chope d’hydromel, un bon repas en somme. Elle paya son repas et en profita pour fournir l’argent pour sa chambre. L’homme lui rapporta la clé avant de retourner derrière son comptoir. Sora entreprit ensuite de dévorer ce qu’il y avait sur son assiette, appréciant la tranquillité de la taverne.

Encore une longue ballade, juste après le conflit après les rebelles. Cette fois ci il était certains que des démons et même des renégats étaient dans cette affaire. Bien qu'épuisée, je devais mener mon enquête et procéder à un petit nettoyage. Toute seule, cela prendrait du temps. Je commençais de plus en plus à penser que j'en faisais peut être plus ce que je devrais, surtout si on considère que je ne dois me comporter que comme une "simple humaine", de l'aristocratie qui plus est. Après la destruction du camp rebelle, j'avais demandé à mes troupes restantes et aux Animae nous accompagnant de rejoindre la forteresse assiégée, afin de leur prêter main forte. Je leur avais aussi signalé le fait que j'avais une affaire à régler dans la région, avant de les rejoindre. Il m'a fallu beaucoup de temps et de persuasion pour qu'ils me laissent partir toute seule. Surtout les Animae, qui voulait me laisser l'un de leur guerrier. Je refusais, disant que c'était une affaire personnelle, et qu'il n'y avait plus rien à craindre à présent que le camp rebelle venait d'être annihilé. Ils restaient sceptiques, surtout avec la présence des démons dans les parages. Mais bon, je fais ce que je veux en un sens !
J'avais tout simplement pris mes précautions en partant, prenant un cheval, quelques vivres, de l'argent et une épée. Je voyageais avec ma cape, mais aussi une armure légère sur le corps. Non pas celle que j'arborais en tant que chimère, mais celle qui m'avait été faite par les humains. Elle n'était pas aussi solide que mon armure dragon, mais elle restait néanmoins légère, discrète, et tenait chaud. Je partais vers les sentiers connus des montagnes rocheuses, faisant attention à ne pas être suivie.

Je mis plusieurs jours à atteindre le dernier village habitable par les humains. Au delà de celui ci, tout était sauvage jusqu'au territoire des elfes. Mon cheval était fatigué, et moi aussi. Il y avait une auberge, peu fréquentée mais convenable. Je m'y arrêtais, c'était deux jour après mon départ du campement. Je confiais mon cheval au palefrenier, lui demandant d'en prendre bien soin tant que je serais ici. Je pris mon arme et mes affaires de la selle, rentrant dans l'auberge. J'allais voir le patron, lui demandant une chambre pour les trois jour à venir. Je payais d'avance, et demandais à ce que l'on me serve de suite de quoi manger et de la bière. Il fut surpris de me voir, mais ne posa pas de question. Il me donna une clé, et me dit de m'installer dans la salle pour avoir mon repas. Il n'y avait pas grand monde à cette heure ci, et c'est en m'installant dans un coin que je pris mon repas, en silence. J'étais très fatiguée, mais j'avais surtout faim. Cela faisait longtemps que je n'avais pas utilisé ma forme intermédiaire, et mine de rien avec les blessures ça creuse. Je mangeais avec avidité et buvais autant. Une fois mon repas terminé, je remarquais qu'au dehors il faisait bien sombre. Je repris mes affaires, me levais et allais voir le patron.

" Que l'on ne me dérange sous aucun prétexte, et que l'on s'occupe de ma monture. Merci"

Je donnais une nouvelle pièce au patron, et montais dans ma chambre. J'ouvris la chambre, qui était petite, froide et miteuse. Je jetais mes affaires dans un coin, et fermais la porte à clé. Pour plus de sûreté, j'apposais l'une de mes mains au sol, et murmurais quelques incantations. Un léger grésillement dans l'air, puis plus rien. Parfait, avec ça je devrais être tranquille. Personne ne peut entrer dans cette pièce, ni entendre, ni même sentir ma présence.
J'allais m'affaler sur le lit, sans enlever ma cape ni mon armure. Je sombrais presque instantanément dans un profond sommeil.
Ce ne fut que deux jours plus tard, alors que la nuit avait recouvert son voile sur les montagnes depuis une bonne heure, que je me réveillais. J'avais mal un peu partout, mais surtout faim. Je me levais, me massant la nuque, et alla vers la porte. Je prononçais quelques mots pour défaire momentanément le sort, puis sortis de la pièce. Je descendis jusqu'à la salle de repas, voyant qu'il n'y avait pas non plus foule ce soir. Encore un peu endormie, j'allais vers le comptoir pour commander un repas auprès du patron. Il prit la commande, et en attendant je pris une bière. Je me retournais pour voir la salle, analysant un peu plus qui était là. Je me figeais en sentant soudainement la très fine aura démoniaque, et fut soudainement en alerte. Mon regard se porta sur une personne en train de manger, qui ne me regardais pas. Ma panique fit place à la surprise, et au contentement. Ce démon, je le connaissais. Ou plutôt, je la connaissais. Je souriais légèrement, me demandant pendant un temps si je devais faire un geste ou non. Ho, si je ne le fais pas, ce ne serait pas drôle !
Je pris ma chope et m'avançais vers la personne. Sans attendre son avis, je m'asseyais en face d'elle, souriant avec malice. Je l'interpellais, d'une voix douce et amusée.

" My my, si je m'attendais à te rencontrer ici, Sora... "

Je posais l'un de mes doigts sur la table, traçant un cercle invisible avec et murmurant quelques petites incantations rapides. Une légère sensation de picotement, et tout allait mieux. Rien ne semblait avoir changé, et pourtant... Quoi qu'il arrive, personne en dehors de cette table ne pouvais "comprendre" ce que nous nous disions. Ils nous entendaient, c'est certain, mais ne pouvaient pas comprendre nos paroles, comme si nous étions des étrangers. Je continuais de parler, m'adossant un peu plus à la chaise et me délectant de la tête de Sora. Je continuais de parler, mettant un peu de suspense dans mes paroles.

" Cela fait longtemps, et pourtant si peu en même temps, hu hu hu ~ . Ma mort t'a t'elle amusée un peu ? Avoue au moins que quand je sors de la scène, je le fais avec panache ! "

Sora la regarda s’assoir sans surprise apparente.
Elle la laissa parler sans l’interrompre et finit son repas par la même occasion, prenant son temps. La jeune femme ne lui répondit pas tout de suite, gardant le silence un moment. Elle ne réfléchissait pas à une réponse à lui donner, la sienne étant déjà toute prête. La démone voulait plutôt lui faire croire qu’elle lui en voulait, qu’elle ne lui pardonnait pas de lui avoir caché sa fausse mort. C’est vrai que, sans nouvelle à ce sujet-là, tout le monde aurait été attristé par la perte d’un proche ou d’un ami. Et le voir réapparaitre quelques temps plus tard en avouant qu’il s’agissait d’une blague de nouveau goût, était vexant et avait le don de vous mettre sur les nerfs.
Son silence témoignait de ce genre de pensée. Pourtant, un sourire amusé étira ses lèvres au bout de plusieurs minutes. C’est alors qu’elle prit la parole:

C’était très réussi! Tout le monde y a cru!

Pour ce qui était de Sora, c’était un peu raté. Elle n’était pas bête et ne s’était jamais résolue à croire une telle chose. Shrikan avait toujours été une battante, et malgré les mauvaises passes, elle parvenait toujours à s’en sortir, qu’elles que soient les difficultés. Lorsqu’on la connaissait sous ce jour, mourir d’une telle manière était complétement insensé, une pure invention. Pourtant, beaucoup y avaient cru!
La démone lui sourit encore, s’accoudant sur la table. Elle poursuivit ensuite par une simple question:

Mais dis-moi, en qui t’es-tu réincarné? Ce sera stupide que je lâche ton vrai nom alors que tu es sensé avoir disparu!

C’est vrai que ce serait vraiment débile.
Voyez la scène. Les deux femmes se croisent dans la rue et Sora ne trouve rien d’autre que de lui lâcher : « Oh Shrikan comment ça va? ». Elle qui devait être morte, se retrouverait au milieu de passants complétement abasourdis par cette révélation.
Mais la démone n’était pas stupide au point de crier son nom dans un endroit bondé. Si son amie avait mis en scène sa mort, c’était qu’elle avait ses propres raisons. Donc, elle aurait certainement évité de l’appeler par son vrai nom. Il n’empêche que c’était toujours bon de savoir sa nouvelle identité.
Cependant, Sora ne s’arrêta pas sur une simple question de nom. Elle en posa une seconde:

Et puis, qu’est-ce que tu deviens maintenant?

Elle ne me répondit pas au début. Patiente, je restais là, sachant pertinemment que si elle voulait que je parte, elle me l'aurait fait savoir de suite. J'attendis, et mon repas me fut servit à la table. Elle finissait le siens, et je commençais le mien. Je plantais donc ma fourchette, n'allant pas rester à buller le temps qu'elle me réponde. Elle finit tout de même par le faire, répondant avec un sourire amusé. Je souriais aussi, me rengorgeant et lui répondant sur le ton de la fausse modestie.

" Tss, bien entendu que c'était réussi, vu que je suis vraiment morte ! Cela n'était pas vraiment mon plan de mourir comme cela, mais bon, je ne contrôle pas certaines de mes émotions. "

Je riais légèrement. Il est vrai que c'était sous le coup de la tristesse et de la colère que j'avais pété les plombs. C'est pour ça que j'étais plus dangereuse qu'un haut dragon, car mes émotions humaines étaient un moteur très puissant de motivation et de magie destructrice. Enfin, je suis morte, punie par les dieux pour l'affront que je leur ais fait. Mais maintenant je m'en fiche, ils ne me concernent plus. Je continuais de manger mon assiette, ayant de plus en plus faim.
Sora me demanda ensuite sous quel nom j'étais à présent, se doutant bien que je n'avais pas gardé mon ancien. Je finissais mon morceau de viande avant de lui répondre, en profitant pour réfléchir.

" L'affaire est un peu compliquée, une fois de plus. Mon âme et mon esprit ont été endommagés par l'Orbe, je ne pouvais donc pas me réincarner dans un corps normal. Ce n'est donc pas une vraie réincarnation qui s'est opérée, comme on pourrait l'entendre. C'est un corps artificiel créé par Malvanos, et j'ai ensuite été envoyé avec sur les Terres Franche dans une famille noble. J'ai été renommée Tullia, de la famille Estrama Von Raijer, duché de Hertforshire. Pas mal hein ~..."

Sora était suffisamment maligne et stratège pour se douter qu'un tel poste aristocratique n'était pas sans conséquence, vu le personnage que j'étais. Avec les pouvoirs d'une Gardienne j'avais changé le monde des immortels et des mortels, alors avec le pouvoir d'une humaine de haute lignée, j'étais au moins capable de changer les choses sur les Terres Franches. J'en étais capable, et je comptais bien le faire.
La démone ne se contenta pas de me poser cette simple question de politesse, et elle me demanda ce que je faisais en ce moment. Je réfléchissais rapidement avant de lui répondre.

"Pour ce que je fais, c'est un peu compliqué. Grâce à mon titre, à la réputation de ma famille et à la mienne que je me suis crée depuis ces cinq dernières années, je peux gérer un peu mieux les affaires du royaume d'Aratanye, en étant Conseillère diplomatique royale et Membre du Conseil de Régence. J'essaye de régler les problèmes entre les humains et les Animae, principalement, et de tenter de nettoyer un peu la Cour de tous ses espions démoniaques et renégats. Mais ce n'est pas si aisé, je dois à la fois agir avec mon poste officiel, et à la fois agir dans l'ombre. Quelque chose se trame avec les démons, et je ne crois pas que ce soit de la même ampleur qu'avant, cela m'inquiète..."

Je vidais mon assiette, en redemandant une autre au serveur. Je m'attaquais à ma bière à présent, mais continuais sur ma lancé. J'avais une petite idée en tête, maintenant que je voyais Sora. J'étais persuadée qu'elle pourrait m'être utile. Du moins, si elle acceptait.

" C'est pourquoi j'ai pensé à... Une sorte de solution, pour m'éviter de devoir partir de nouveau en croisade et me faire trucider par les dieux. Après tout, si je suis de nouveau vivante, c'est pour vivre une vie normale ! Bon, je te le concède, ma notion de normal est assez particulière, mais ça marche. Bref... Je sais que tu as été comme moi dans beaucoup de mondes, et je voulais avoir ton avis sur un projet que j'ai en tête..."

Je posais ma bière, me rapprochant de la table. Je regardais dans les yeux la belle Sora, une lueur de malice brillant dans mon regard.

" Pour palier le problème des Gardiens, et permettre que Justice soit tout de même faite dans ce monde, j'ai pensé à monter une guilde de dragonniers. Qu'en penses tu ? "

Son avis m'importait, car elle avait autant de connaissance que moi sur le sujet, mais surement un point de vue plus réaliste et moins optimiste. Je devais confronter mes arguments au siens, pour voir si cela allait marcher.

Sora lui sourit lorsque son amie déclina sa nouvelle identité.
Elle lui fit un signe de tête en guise de révérence avant de lui lâcher qu’elle était contente de faire sa connaissance, faisant comme s’il s’agissait de leur première rencontre. D’un côté, ce n’était pas faux puisqu’elle ne l’avait jamais rencontré sous les traits de ce nouveau personnage. Il n’empêche que pour la suite, la démone ne l’interrompit pas, n’ayant pas vraiment mot à dire sur le sujet. Elle préférait tout simplement l’écouter parler. Et puis, même si elle avait beaucoup de responsabilités, Shrikan n’était pas si mal tombée. D’ailleurs, sa réincarnation lui faisait un peu pensée à la sienne, sauf que dans le cas de la démone, elle s’était retrouvée dans une famille dont le père était général d’arme. Mais cette pensée, elle la garda pour elle.
Lorsque Shrikan lui parla de ses doutes au sujet des démons, elle n’en fut pas surprise. Même si elle n’avait pas été particulièrement sur les terres démoniaques, elle savait cependant qu’une certaine tension régnait aux abords de leur territoire et que des rumeurs sinistres circulaient à leur sujet. Sur ce point, inutile dans faire part à son amie, elle le savait déjà. Par contre, elle avait d’autres nouvelles pour elle. La jeune femme s’apprêtait à lui révéler les derniers nouvelles du jour, mais elle la devança avec une question plutôt surprenante. Elle remit donc sa révélation pour plus tard et réfléchit à sa proposition.
Des dragonniers…
Certes, Sora avait traversé de nombreux mondes, trop probablement. Donc le sujet des dragonniers ne lui était pas anodin. Elle en avait vu et apprit certaines choses, mais elle ne les avait jamais approchés. La jeune femme resta silencieuse un moment, approfondissant un peu plus sa réflexion.
C’est vrai que les dragonniers inspiraient en général le respect. Ils étaient tout à fait aptes à protéger une nation, surtout qu’ils travaillaient toujours en duo ce qui leur donnait plus de chance pour surpasser leurs difficultés. Mais leur puissance pouvait se révéler très destructrice. Si les dragonniers venaient à passer dans le côté obscur, ils pourraient anéantir ce qu’ils devaient protéger. De plus, si certains étaient restés fidèles à leur devoir, ils devraient se battre contre les renégats, ce qui entrainerait une guerre dévastatrice. Et comme sur Shibai, certains dragons avaient tendance à changer de bord et à devenir mauvais, ils risquaient de manipuler leur chevalier et d’en faire des guerriers sanguinaires. L’inverse pourrait également se produire…
Mais l’idée était assez séduisante malgré les dangers qu’elle comportait. De toute façon, lorsqu’on y réfléchissait, créer n’importe quelle guilde destinée à protéger les Terres Franches, comportait toujours un risque d’être corrompu. On l’a bien vu avec les Gardiens…
Sora finit par lâcher après un temps de réflexion:

C’est une idée intéressante!

Il n’empêche qu’il lui fallait une peu plus d’information sur son projet, d’où les questions suivantes:

Et comment comptes-tu choisir les dragonniers? Les dragons ont-ils déjà donné leur avis? Et les autres peuples?

Je me mis à rire légèrement quand elle feignit une révérence. Pour rire, je fis un geste de la main, prenant un air pédant et satisfait. Ce titre n'était qu'une farce, car heureusement pour moi les aléas de la vie m'ont obligé à voir les choses d'une manière plus pratique et humble que ce qu'une personne venant de la haute noblesse humaine peut voir.
En dehors de cela, je fus heureuse de constater qu'elle m'écoutait avec attention. Quand je lui posais la fameuse question, je la vis peser le pour et le contre. Je ne disais rien, ne voulant pas la presser pour une réponse qui de toute manière allait tomber. Se rappelait elle en avoir croisé dans d'autres mondes ? J'espérais que oui, car son avis me serait précieux et plus objectif que le mien.
Elle finit par me répondre, disant que c'était intéressant. Mais cette phrase fut suivie par de nombreuses questions, et je ne pus m'empêcher de lui faire un grand sourire, l'oeil pétillant de malice.

" Je n'en attendais pas moins de toi, Sora ~..."

Je pris ma choppe et bus une belle rasade, avant de me lancer dans des explications.

" Pour ta première question, je vais être franche. Ce sera un choix de coeur et de potentiel magique. Tu ne dois pas être au courant mais, vu mon âge, mon expérience de la vie, et mon sang de haut dragon, j'ai cette capacité de.... sentir ce qu'il y a dans les gens. C'est difficile à expliquer, mais si je me concentre assez sur une personne et pour peu que je puisse atteindre son esprit avec le mien, j'arrive à évaluer ce qu'ils sont dans leur coeur. C'est très subjectif, je sais, et moi même je ne saurais te dire exactement comment je fais la différence mais.... jusqu'à présent, j'ai eu 90% de réussite. Et les 10 autres % sont juste des cas qui se sont révélés à double personnalité, ou qui savaient très bien cacher leur part intime de leur être. "

Je regardais ma choppe, à présent vide, et fis signe au barman de m'en apporter une autre. Je continuais, m'affalant un peu plus sur mon siège.

" Mais bon, à part ça, il faut qu'ils aient un grand sens de la justice et qu'ils soient pour l'équilibre. Ca aussi, c'est une chose que je ressens. Et à défaut d'avoir quelqu'un qui soit complètement comme ça, au moins je peux écarter ceux qui sont fondamentalement mauvais ou corrompu. Mais pour cela, peu importe... Le plus difficile a été de convaincre quelques dragons de me donner leurs oeufs. Cela fait plusieurs fois que je fais des allers et retour vers les montagnes, et que je parle avec ceux qui semblent vouloir une plus grande stabilité dans le royaume. Ca n'a pas été facile, mais la promesse d'une plus grande protection et liberté de mouvement quand les dragonniers auront rétablis l'ordre a paru leur plaire. J'ai donc en ma possession un bon nombre d'oeufs qui sont en stase."

Le barman arriva, et je me redressais pour lui faire un sourire et lui donner sa monnaie. Il nous regarda avec curiosité, mais repartit bien vite. De toute manière, il ne comprenait rien à ce qu'on disait. Je pris ma nouvelle choppe, et pris une nouvelle rasade.

" Pour ce qui est des peuples, j'ai décidé que cela n'importerait pas vraiment. Ce qui compte, c'est leur volonté de rétablir l'Equilibre et d'apporter la paix. C'est sûr, certains seront de meilleurs candidats que les autres, comme les elfes, les humains ou les animae. Mais je n'en parlerais jamais aux autorités. Jusqu'au bout, il faut que cela reste un secret. Je peux compter sur les dragons pour leur silence, car de toute manière ils ont décidé d'aller encore plus dans les coins reculés des montagnes. L'ambiance qui règne sur les Terres Franches ne les attire pas beaucoup.
Une fois que j'aurais les gens qui voudront être dragonnier, il me faudra les former. Je ne peux pas tout faire à moi toute seule, aussi il faut que je trouve des professeurs dignes de ce nom, et des leaders. Je ne peux remplir ce rôle, tu sais à quel point je ne suis pas douée pour ce qui est du travail d'équipe. Aussi j'avais pensé que tu serais... peut être intéressée pour faire partie de ça. Tu ferais un bon dragonnier, et nul doute que tu apporterais un plus pour ce qui est de l'art du maniement de l'épée. Qu'en dis tu ? "

Mon regard plein de malice était posé sur elle, mais c'était avec une certaine nervosité que j'attendais sa réponse. Maintenant que j'y avais pensé, je comptais vraiment sur elle pour être présente. Allait elle me faire faux bon ?

Sora l’écoutait attentivement.
Son idée était vraiment intéressante, mais jusqu’où l’avait-elle préparée? C’était la question que la démone se posait. C’est bien d’avoir des plans mais encore fallait-il les réaliser et savoir comment on allait s’y prendre. En entendant les paroles de son amie, elle sut immédiatement que Shrikan y avait longuement réfléchi car elle lui exposa son projet sans la moindre difficulté.
D’après elle, plusieurs dragons avaient déjà donné leur accord dans le plus grand secret. La dragonne lui demandait également de ne rien dire, voulant que son plan aille jusqu’au bout avant de le dévoiler au monde. Sur ce point, elle pouvait lui faire confiance. Ce n’était pas Sora qui allait la trahir comme ça!
Quant au choix des dragonniers, il s’agissait toujours d’un passage délicat. Certes, le choix du partenaire devait subvenir après un coup de cœur, ce qui serait difficile pour certains peuples. Les dragons pourraient faire équipe plus facilement avec des humains des elfes ou encore des animae qu’avec des démons ou des vampires. Hors ce serait mieux qu’il y ait un regroupement de race dans cette fameuse guilde de dragonniers, un peu comme pour les gardiens. Mais est-ce que les grands seigneurs du ciel acceptèrent un tel pacte avec des êtres qu’ils considéraient comme ennemis?
Là aussi, cette question lui posait problème, surtout lorsque Shrikan lui demanda son aide pour former les futures recrues.
Un sourire en coin s’afficha sur le visage de la démone. Cette proposition la ravit dans un sens, se sentant important aux yeux de son amie. Pourtant, de l’autre côté, cette demande ne lui plaisait guère. Elle qui n’aimait pas se mêler des affaires des autres était très tentée de refuser cette offre. Et puis, un autre aspect la chagrinait…
Sora avait parfaitement conscience de sa force. Et la décision de la dragonne n’était pas anodine. Elle savait très bien qu’elle pouvait compter sur elle pour former de bons combattants. Hors, la démone n’avait jamais accepté d’élèves et entrainer les futurs dragonniers était comme tel. Sora n’avait pas vraiment l’intention de commencer maintenant… de plus, qui accepterait les ordres d’un démon alors que les premiers ennemis visés étaient ceux de sa propre race bien qu’elle n’en fasse pas partie à proprement dit.
La démone resta un moment silencieuse, ne sachant pas vraiment quoi répondre. Si elle s’écoutait, elle dirait non sans la moindre hésitation, ne tenant pas à avoir plus de problèmes qu’elle n’en avait déjà. Pourtant, elle hésitait à lui sortir un « non » catégorique. Après tout, ne voyageait-elle pas à travers les mondes pour racheter son passé? Bien sûr que si, mais pas dans n’importe qu’elle circonstance. Non pas qu’elle désirait être payé, mais juste que Sora n’acceptait seulement que si elle combattait loyalement et pour l’équilibre. Le projet de son amie allait plus ou moins dans ce sens. Mais malgré tout, elle hésitait encore…
De longues minutes passèrent sans qu’un seul mot ne sorte de sa bouche. Elle observait sa choppe vide d’un air absent, perdue dans ses pensées. La jeune femme finit par soupirer et souleva sa choppe pour faire signe au tavernier. Celui-ci comprit rapidement le message et servit un autre hydromel qu’il apporta vite à la table. Sora le paya sans discuter avant de poser ses yeux sur Shrikan.
Un sourire amusé étira ses lèvres. Là, seulement, elle prit la parole:

J’ai le regret de te dire non!

Son sourire s’élargit alors qu’elle marquait une pause. Sora finit par reprendre, l’air enjoué:

Tu as oublié de me montrer mon dragon! Et tu ne m’as pas encore permis de martyriser mes élèves!

La démone rit un peu avant de la regarder en souriant de plus belle. Puis elle ajouta au plus grand bonheur de Shrikan (sans doute):

Bien sûr que je vais être de la partie! Depuis quand je n’aide plus mes amis?

Je lui expliquais, observant bien attentivement le visage de Sora. Elle semblait m'écouter avec intérêt, et je m'amusais à essayer de deviner ses pensés par les différentes expressions qu'arboraient son visage. Elle semblait préoccupée par moment, d'autres fois elle avait l'air d'être d'accord. Mais globalement, je sentais le doute. Je ne me laissais décourager, continuant de débattre avec verve mes arguments. Quand j'eus finis, un silence s'installa. Mais je le respectais, continuant de l'observer. C'était clair, elle était sur la sellette, pesant le pour et le contre.
Je ne connaissais pas toute l'histoire de Sora, mais globalement je comprenais son hésitation. Elle était comme moi à l'époque une rôdeuse des mondes, mais son cas était plus grave que le mien. Bannie, elle avait un lourd passé qu'elle tentait d'expier. Lui demander de s'impliquer dans cette affaire n'était pas quelque chose qu'elle pouvait décider sur un coup de tête, car elle était poursuivie. Tout comme pour moi ma Némésis était Arou et sa clique de Renégats et de démons, Sora avait ses propres poursuivants, aussi terribles voir plus que les miens.
Le silence continua, je buvais ma bière. La choppe de Sora fut bientôt vide, et elle en demanda une autre au tavernier. Il la lui rapporta, et enfin Sora daigna répondre à ma demande. Un sourire au début, je croyais l'affaire gagnée. Mais sa réponse me fit descendre de mon nuage. Je soupirais, penchant la tête sur le coté pour la supplier, comme un chat le ferais s'il avait une voix mielleuse et tentante.

" Aaaw, allez ! Ce sera plus amusant que ce que tu crois ! Dit oui s'il te plait ~... "

Je lui faisais le coup des yeux de bambi, un sourire malicieux sur le visage. Si elle pensait que j'allais la laisser partir avec cette simple réponse, elle se mettait le doigt dans l'oeil ! Mais bientôt un nouveau sourire s'afficha sur son visage, et elle me répondit quelque chose qui me fit rire et qui me rassura grandement.
Je souriais de toutes mes dents à mon tour, heureuse d'avoir une nouvelle alliée.

" Tu m'as fait peur ! Ne te moques pas de moi comme ça, tu sais que je ne suis plus toute jeune. Mais ne t'en fais pas, martyriser les élèves est un acquis. Après tout, c'est bien notre petit amusement que l'on se doit, en tant que professeur non ~ ? "

Je lui fis un clin d'oeil, vidant ma choppe. Elle répondit qu'elle venait en aide aux amis, et j'étais émues d'être considérée comme telle. Dans mon métier d'avant, c'était rare d'avoir des amis durables. Je le regardais, un peu étonnée, puis me mis à rougir légèrement. Je pris une expression de jeune fille timide, comme si j'étais devant un bel homme qui vient de me faire une confession, et lui réponds en minaudant.

" Sora voyons, tu me fais rougir à dire cela ~ ! Ce genre de confession en publique me rend toute chose, fu fu fu ! "

Je riais de nouveau, et demandais au barman une autre choppe. Il me la ramena, et tout en redevenant un peu plus sérieuse, je continuais de parler. J'avais décelé tout de même dans son trait d'humour un problème qui devait la titiller, et dans le doute je préférais la rassurer du mieux que je pouvais.

" Pour ce qui est du dragon, ne t'en fais pas. Certains seront adultes, certes, mais d'autres seront encore dans l'oeuf. Et pour ceux dans l'oeuf, l'avantage est qu'ils regardent le coeur, et non l'espèce. De plus, tu ne seras pas la seule démone de la partie. Mon garde du corps, qui n'est pas ici parce que j'ai réussi à m'en débarrasser pour le moment, est aussi un démon. Son nom est Ragn, et il ne vient pas de cet archipel de monde. Je l'ai rencontré il y a une centaine d'année, alors qu'il était tout gamin, dans un monde plus évolué technologiquement. Je l'ai rpis sous mon aile pendant un temps, avant de disparaitre. Et crois le ou non, mais en grandissant il m'a cherché dans tous les mondes. Et pourquoi à ton avis ? Pas par amour, ça non.... Pour me battre en duel ! L'élève qui veut battre le maitre. Il a de la chance que je ne sois plus aussi puissante qu'avant, sinon il serait déjà retourné chez lui la queue entre les jambes ! Enfin... quoi qu'il en soit, il a bon coeur, et on peut lui faire confiance. Je suis certaine qu'il te plairait, il a un sale caractère qui est très amusant à taquiner ~ ! "

Je me mis à rire à nouveau, repensant comment il devait être furieux que je l'ai abandonné pour aller dans les montagnes. C'est sûr, quand je vais rentrer, ça va être ma fête.

Sora la laisse parler, écoutant son récit sur les œufs de dragons et sur son élève.
Elle esquissa un sourire lorsqu’elle parla de lui. La démone aussi en avait eu, près peu, mais elle avait déjà entrainé quelques élèves. Elle n’avait jamais apprécié cela, du moins, c’était ce qu’elle essayait toujours de faire croire. A vrai dire, servir de modèle ne l’avait jamais dérangé ni même partagé ses techniques avec une poignée de disciples. Ce qu’elle n’aimait pas par contre, était le fait de s’attacher à eux. Certes, ce n’était pas vraiment une relation amicale qu’il y avait entre le maitre et l’élève, mais plutôt une relation de confiance. Et Sora ne partageait pas facilement sa confiance avec autrui. Rares étaient ceux qui l’avaient…

Maintenant que la démone avait un peu ri en taquinant son amie, Sora redevient un peu plus sérieuse quant à l’affaire que Tullia lui proposait. La jeune femme avait accepté son offre, elle ne pouvait donc plus reculer. D’ailleurs, elle n’était pas prête de se désister, ce n’était pas son genre de toute façon. Il n’empêche que la démone n’offrait pas ses services bon vous semble. Elle impose en général quelques règles. Dans le cas où on ne respecte pas ce qu’elle a demandé, elle vous laisse tomber tout simplement du jour au lendemain.
Sora laissa Tullia achever sa choppe avant de commencer à parler:

Je suis prête à t’aider certes…

Elle marqua une courte pause. Ce mot de silence n’était pas placé pour n’importe quelle raison. Il ne servait pas à lui laisser le temps de chercher ses idées, mais plutôt à attirer l’attention de son interlocutrice, l’avertissant qu’elle était tout à fait sérieuse sur ce qu’elle allait dire prochainement.
Sora regarda Tullia droit dans les yeux, puis déballa ce qu’elle avait à dire:

Je suis d’accord pour t’aider, de servir de professeur! Mais j’ai mes règles! Je choisis mes élèves et je n’en prendrai que deux ou trois, pas plus! Ensuite, c’est moi le professeur! Personne n’aura d’autorité sur mes élèves, sauf moi! Ils sont libres de refuser tout ordre venant de quelqu’un d’autres! Et bien sûr, je reste libre de mes décisions et de mes actes! J’entraine mes élèves comme je veux, je vous aide comme je l’entends! Le premier qui m’ennuie, je le tue! Qu’il soit ami ou ennemi!

La démone se tut à nouveau, lui laissant le temps de faire le point sur ce qu’elle venait de lui demander. L’offre que lui avait fait Tullia n’était pas à prendre à la légère, elle en avait conscience. Mais ce qu’elle venait de lui proposer non plus. Sora avait accepté de l’aide et elle le ferait sans hésiter. Mais Tullia accepterait-elle ce que la démone lui demandait en retour? Dans un sens, ce n’était pas grand-chose… mais certains petits détails pouvaient avoir des effets sur le comportement de Sora, qu’ils soient bénéfiques ou non. Désormais, c’était à Tullia de choisir. Admettre son offre au risque de la voir se retourner contre elle au moindre faux pas.
Sora attendait avec impatience son verdict, la regardant avec un sourire aux lèvres.

Sora semblait accepter mon offre. Cependant, elle avait ses conditions. A mesure qu'elle les énumérait, mon visage se referma, mon expression se faisant plus soucieuse. Cela allait poser problème.... Je ne répondis pas de suite à ses conditions. Regardant ma chope, songeuse et pesant le pour et le contre, j'établissais les limites de ce que je pouvais lui accorder. La convaincre n'allait pas être facile. Je pris une légère inspiration, préparant à déballer avec soin mes arguments.

"Je comprends tes conditions, Sora. Cependant, je pense que la notion d'enseignement que tu prévois est différente de celle que nous allons instaurer dans cette guilde. "

Je hélais le barman pour qu'il me reserve, et continuais.

"Pour cette guilde, afin d'éviter des conflits et une hétérogénéité trop grande entre les compétences de chaque dragonnier, l'enseignement en sera pas à l'ancienne. Un professeur enseigne une certaine compétence, à tous les élèves. La manière dont cela est effectué, et comment les élèves sont recalés ou punis, dépendra entièrement du professeur. Ils doivent être aussi polyvalents que possible, aussi je ne peux prendre de risques. Je ne remets en rien tes compétences, mais tu as tes points forts, et d'autres membres qui ont acceptés de m'aider en ont d'autres. Je crois aussi qu'une mélance racial au niveau des professeurs va les aider à être plus.... tolérants et ouverts. "

La démone continuait de l’écouter.
Il n’empêche que son regard passait d’un coin à l’autre de la salle. Non pas que cette conversation l’ennuyait, au contraire elle était digne de son intérêt, juste par simplement plaisir d’observer les gens qui se trouvaient dans la taverne. Il y avait principalement des hommes, une ou deux femmes. L’endroit était bien rempli, ce qui devait faire le profit de gérant de l’établissement. Personne ne semblait s’intéresser aux deux femmes, ce qui était plutôt une bonne chose. Elles ne seraient pas dérangées de sitôt, du moins tant qu’un ivrogne ou un homme totalement fou ne les accoste.
Sora posa son regard sur son amie dès que celle-ci eut fini son discours. La jeune femme resta silencieux un certains, réfléchissant aux arguments de Shrikan. D’après ce que la démone pouvait voir, du moins par le fait que la dragonne insiste auprès d’elle, elle conclut que son amie voulait l’avoir absolument dans ses rangs pour former les futurs dragonniers. Sora n’aurait pas dit non mais puisque les conditions qu’elle avait énumérées quelques instants plus tôt n’étaient pas toutes respectées, elle pensait lui répondre négativement. Ce qu’elle fit au bout d’un moment:

J’ai le regret de refuser dans ce cas!

La démone appela le serveur qui s’empressa de prendre d’autres commandes avant de venir près d’elle. La jeune femme commanda une nouvelle chope d’hydromel. Le serveur repartit immédiatement au bar porter ses commandes avant de repartir en salle. Ce fut un autre qui vint apporter la boisson. Sora le paya et reporta son attention sur Shrikan.
Certes, elle venait de refuser sa proposition, mais elle était tout de même curieuse quant à son projet. Alors, elle relança un peu la discussion à ce sujet:

Admettons que j’accepte? Quel serait mon rôle et de combien d’élèves serais-je le maitre?

Patience était mère de vertu. Mais il faut avouer qu'avec moi, ce n'est aps toujours le cas. Je voyais bien que Sora s'amusait à me faire mariner, et je lui revaudrais ça un jour ! Mais bon, ce petit jeu reste tolérable, entre amies. Cependant, sa réponse me mit dans un certain désarroi. Je soupirais, croisant les bras devant moi et prenant une mine boudeuse.

" Humpf, tu es bien dure..."

Mes conditions ne sont en rien insurmontables, et j'étais certaine qu'elle aussi, recherchait en un sens un peu de compagnie. De plus, avoir un ou plusieurs élèves est toujours gratifiant, et permet de s'ouvrir et de se sentir mieux par le partage. Enfin, cela n'est que mon expérience personnelle.
Mais contrariée comme je l'étais, je ne faisais que jeter des coups d'oeil courroucés sur le coté. Je savais que vouloir forcer la main de Sora se retournerait contre moi, aussi je ne pouvais que pester en silence et ronger mon frein. Trouver une autre tactique était de mise, mais je devais bien réfléchir à mes mots. Pendant que je réfléchissais et buvais rageusement une gorgée de ma bière, Sora avait repris commande. Le silence s'était installé, mais cela ne dérangeait en rien. Au bout d'un moment, Sora repris al conversation, à ma plus grande surprise. Je la regardais un instant avec surprise, avant de me remettre à sourire légèrement. Je posais ma chope, et m'accoudais à la table.

" Pour ce qui est du nombre d'élève, je ne peux te dire avec certitude. Nous possédons pour le moment une quinzaine d'oeufs, mais rien ne dit que nous trouverons quinze personnes digne d'en être les partenaires. Je ferais moi même les sélections, en lisant dans leur coeur. Mais après, s'il se trouve que l'un d'entre eux change de trop et prend la mauvaise direction, il faudra s'en défaire."

Je haussais des épaules, buvant une nouvelle rasade. Oui, éliminer les indésirables serait nécessaire. On ne pouvait se permettre la moindre erreur. La manière pour se débarrasser d'eux, je n'y avais pas encore pensé. Tout dépendra de leur faute. La mort, peut être bien. Mais je prévoyais surtout de leur faire tout oublier, en même temps que de rompre leur contrat magique avec le dragon. J'espérais ne pas avoir à en arriver là, ceci allant demander beaucoup d'efforts et d'énergie. Tuer serait le plus facile et le plus simple. Mais ce n'est pas la chose la plus.... humaine à faire, sans doute.
Je repris là où j'en était, voulant expliquer un peu plus ce que j'attendais d'elle. Enfin, j'essaye.

" Ce que j'attends de toi, Sora, c'est uniquement que tu enseignes ce que tu penses être important pour un dragonnier. Ou tout simplement, pour un guerrier accompli. Pour ma part, je me chargerais d'éduquer les élèves à l'art de survivre dans des milieux hostiles, comment devenir le prédateur au lieu de la proie. Et pour est des dragons, je vais leur enseigner à ne pas sous estimer au combat plus petit que soi. Selon moi, ce sont des choses importantes à enseigner. Il devront aussi cultiver l'art de se battre individuellement ou en équipe, mais sur ce dernier point je ne suis en aucun cas une spécialiste. Et je n'aurais pas le temps.... "

Oui, j'aurais d'autres choses à faire, pendant ce temps là. Faire des razzia chez les démons et les vampires, nettoyer les Terres franches des Wyrms et goules qui allaient sans doute se mettre à errer. Mais bon, tuer est ce que je fais de mieux, cela ne me dérange pas. Je le fais en toute connaissance de cause, et pour une bonne cause selon moi. Il était temps que j'accepte ce que je suis, un minimum. J'essaye d'être une humaine pacifique, mais cela ne semble pas porter ses fruits comme je l'entendais. Je devais me faire une raison, à présent.
Enfin, revenons à l'important. Un nouveau sourire malicieux s'était affiché sur mon visage, et mon regard pétillant s'était rivé sur le sien. Je lui retournais la question, voulant moi aussi savoir ce qu'elle attendait de tout cela.

" Ce qui compte, pour moi, c'est ce que TU souhaiterais enseigner à des élèves, s'il se trouve que tu en ais. Quelle serait ta manière de voir les choses, Sora ? "

Sora continuait de réfléchir à cette proposition.
Le doute était toujours présent. Elle avait très envie d’aider son amie, elle lui devait bien ça. Cependant, la jeune femme ne tenait toujours pas à s’immiscer dans les affaires des autres mondes. Après tout, elle restait étrangère ici. Une action de sa part pourrait chambouler l’histoire de ce monde. Une nouvelle question de la part de Tullia vint malgré tout titiller sa curiosité. Que ferait-elle si elle avait des élèves?
La démone repartit dans ces réflexions suite à cette demande. Sora n’avait pas eu énormément de disciples, pour ne pas dire qu’elle en avait eu très peu. Trois ou quatre tout au plus! Et encore, elle ne leur avait jamais tout enseigné, préférant garder l’ensemble de ses techniques pour elle. Mais à chaque fois qu’elle devait enseigner son art, elle commençait toujours de la même façon: choisir une arme appropriée. Apprendre à se battre ne servait à rien si on n’avait pas la bonne arme en main. La jeune femme fit part de cette première idée à son amie. Puis, elle lui affirma qu’elle les entrainerait avec tout d’abord des gestes simples et basiques pour arriver au plus complexes. Puis, la démone leur apprendrait à manier toutes sortes d’armes ou de s’armer et combattre avec n’importe quel objet, leur montrant ainsi que même désarmés, ils auraient toujours la possibilité de se battre.
Après quoi, si ce n’était pas fait par quelqu’un d’autre, Sora regarderait leur potentiel magique, les entrainerait un peu pour ensuite essayer de combiner les armes et la magie.
Maintenant, ce qu’elle avançait s’avérait être déjà un beau programme si elle devait maitre. Encore fallait-il qu’elle accepte! Mais au fur et à mesure qu’elle parlait avec la femme qui se tenait en face d’elle, son envie de l’aider – et de martyriser quelques élèves – se faisait de plus en plus oppressante. Désormais, la démone trouvait qu’elle avait fait assez durer son refus et décida de mettre un terme à ce petit jeu:

Je suis partante pour t’aider! Mais le premier disciple qui me manque de respect, je le tue!

Elle marqua une pause avant de reprendre sur une dernière condition:

Je ferai comme je l’entends! Je ne prendrai pas en compte les remarques des autres profs sur ma manière d’enseigner! Et ne crois pas non plus que j’enseignerai tout mon savoir!

Sora acheva sa choppe et en recommanda rapidement une autre. Puis, elle lâcha sur un petit air narquois:

Clair et satisfaite?

[HRP: Désolée pour cette longue attente et pour cette réponse très courte - -"]